sábado, 2 de março de 2024

“Vous êtes analphabète?”

La réponse douce détourne la fureur, mais la parole dure suscite la colère. (Proverbes 15:1).

Ce samedi devait être ma journée de congé, mais une collègue, pour une raison quelconque, ne pouvait pas assurer sa permanence et je me suis engagé à la remplacer. Je suis parti tôt de chez moi. Comme je vis relativement près du lieu de travail, j’ai décidé d’y aller à pied, étant donné que le jour a débuté de manière agréable et accueillante.

Dans mon itinéraire se trouvait le Dique do Tororó, un véritable paradis avec son miroir d’eau majestueux reflétant les arbres luxuriants qui l’entourent. Et bien sûr, j’allais profiter de l’occasion pour faire mon “voyage” mental, “écrire” mes chroniques et contes, réciter à voix basse mes vers. Et c’est ce que j’ai fait.

Dique do Tororó - Salvador - Bahia - Brésil. Photo: Novais Neto.
Arrivé sur le site de mon labeur, au Service de Libération des Véhicules Saisis de Transalvador*, à 9 heures, l’accueil au public a commencé. J’étais déjà là, prêt à l’un des guichets, quand un homme et une femme bien habillés sont entrés, encore humides de leurs cheveux, leurs parfums embaumant agréablement tout l’environnement.

Le monsieur s’est dirigé vers mon bureau. Je l’ai salué, et lui, sans même me regarder, m’a répondu sèchement. Et de manière grossière, il a pratiquement jeté sur le comptoir le Formulaire de Saisie de Véhicule. Comme c’est la routine dans ce type de service, je lui ai demandé les documents du véhicule et le permis de conduire, quand j’ai entendu ces questions sonores et inattendues en guise de réponse:

— Vous êtes analphabète? Vous ne savez pas lire, hein?

J’ai inspiré profondément, baissé légèrement la tête et, avec beaucoup de calme que je ne sais d’où j’ai trouvé, je lui ai dit posément:

— Citoyen, vous êtes la première personne que j’assiste aujourd’hui. C’était le tour d’une collègue qui n’a pas pu venir. Vous n’avez rien à voir avec ça. Mais c’est tellement dommage que notre journée commence de cette manière. Donc, je vous demande les documents du véhicule et votre permis de conduire, s’il vous plaît.

— Le document de la voiture, vous l’avez aussi saisi.

À cela, il avait raison. Par négligence de ma part, je n’ai même pas remarqué que l’agent ayant émis le formulaire de saisie avait noté que le document du véhicule était annexé, c’est-à-dire qu’il avait été récupéré. Je suis alors allé au casier où se trouvent ces documents, j’ai pris le dossier et suis retourné calmement à l’accueil, quand cet homme a de nouveau pris la parole, cette fois-ci d’une manière un peu éduquée, peut-être pour exprimer des regrets pour les paroles acerbes qu’il m’avait adressées:

— Excusez-moi. Vous n’y êtes pour rien. Si ma voiture a été saisie, c’est exclusivement de ma faute, j’ai omis de payer la taxe de circulation. Et imaginez, lors de la première interaction de la journée, vous recevoir un “cheval devant”**?

Illustration: Adriel Santos. 2022.
— Non. Ce n’est pas ainsi que je le vois. Vous n’êtes pas un cheval**. Si j’étais à votre place, sans aucun doute, je serais contrarié, peut-être que je n’agirais tout simplement pas de cette façon. Mais bon, tout est bien, tout est pardonné, tout est réglé, ai-je répliqué, et il a continué:

— Avant de retirer ma voiture, j’aimerais la voir d’abord. Puis-je?

— Bien sûr.

Comme c’est aussi la procédure, je pouvais lui donner une autorisation pour qu’il la présente à l’agent responsable de la fourrière où sont entreposés les véhicules saisis, afin qu’il puisse voir sa voiture. Je ne l’ai pas fait. J’ai préféré l’accompagner moi-même. Arrivés là-bas, il a examiné attentivement son véhicule et nous sommes retournés à l’accueil, où j’ai émis un avis de paiement des frais de remorquage et de séjour.

Il est sorti pour payer. Quelque temps plus tard, il est revenu et je suis retourné au parking avec lui pour libérer la voiture. En chemin, il m’a de nouveau présenté mille excuses et a dit que ce n’était pas son comportement habituel. Cela a peut-être été le reflet d’une journée de travail épuisante dont il est victime, étant l’un des ingénieurs civils d’entreprises de construction, responsable de la construction de l’Arena Fonte Nova, avec des délais serrés pour sa conclusion. Et j’ai essayé de le comprendre d’une certaine manière.

La vie nous confronte à de multiples moments comme celui-ci pour tester notre patience d’une certaine manière. Si nous rendons les coups que nous recevons, ce ne sera certainement pas la meilleure option, car agir ainsi ne nous rapportera que des ressentiments, des rancœurs et des regrets.

Si cet auteur, d’autre part, avait agi différemment, il est certain que cette chronique n’existerait pas et, qui sait, elle ne servirait même pas, dans l’éventualité, de réflexion pour celui qui en aurait pris connaissance et déciderait de la mettre en pratique. De plus, et enfin, l’enseignement de la sagesse et du bon sens exprimé dans la célèbre phrase du poète maranhense*** Ferreira Gullar prévaudra souvent pour moi: “Il vaut mieux être heureux que d’avoir raison.”

[
Traduit en français par Diego Steeg et Celo Costa. Chronique originale en lanque portugaise disponible sur: https://www.novaisneto.com/2022/06/um-cavalo-pela-frente.html.]

Observations:

* Transalvador: La Surintendance de la Circulation de Salvador (Transalvador) est un établissement municipal relevant de la Mairie de Salvador, ayant pour mission de gérer le système de circulation de la municipalité, les parkings publics et d’exécuter les activités prévues par le Code de la Route Brésilien.

** “un cheval devant”: Dans la langue de l’auteur, le cheval désigne aussi une personne stupide, mal éduquée ou alors grossière.

*** maranhense: Fais référence à une personne originaire de l’état brésilien de Maranhão.

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